mercredi 16 septembre 2015

L'écologie du cuir

   Je suis inscrit à la newsletter de Maxime de Jacques et Demeter, un fabricant de chaussures de luxe en cuir. Bien que je ne sois pas du genre à m'offrir ce genre de merveilles, pour une question de finances plus qu'autre chose, j'aime beaucoup le contenu de Maxime. Dans le courrier en question, il évoque un sujet auquel on ne fait pas forcément attention : l'origine du cuir que nous achetons.

« Sérieusement, qui mange avec des couverts en plastique à la maison? »
 
Bonjour.

Avant de rentrer dans le vif du sujet j'ai 4 questions :

Saviez-vous…

 - que les souliers « en cuir » de 50 à 150€ sont en fait fabriqués en croûte de cuir?
 - qu’ils ne sont pas pensés pour tenir plus d’un an, même si vous les bichonnez dans les règles de l’art, et ne ressembleront plus à grand chose après quelques ports?
 - qu’ils ont souvent activement participé à la déforestation? Oui, on rase des forêts afin d’avoir de la place pour élever des bovins.
 - que leur faible coût nécessite une main d’oeuvre très bon marché (= pays du tiers-monde), des processus peu coûteux, toxiques, destructeurs ET de l’environnement ET de la santé des ouvriers? [...]

 Déboiser l'Amazonie pour élever des bovins

    C'est surtout le troisième point, sur la déforestation qui a attiré mon attention. Or, après vérification sur le site de GreenPeace, le propos s'avère fondé. Le débat sur l'abattage des arbres de la forêt amazonienne fait rage depuis que je suis enfant. On ne peut pas empêcher une population de développer son économie, mais on n'est pas non plus forcés de l'y encourager. 
Stéphane Bourriaux Cuir - Greenpeace- foret amazonienne
Feu de forêt en Amazonie - source : GreenPeace.org

Expérience personnelle

    Le cuir d'Amérique du Sud, je connais un peu. Lorsque j'étais au Canada, les fournisseurs vendant au grand public n'étaient pas monnaie courante. Or, celui chez qui je m'approvisionnais le plus (je tais son nom pour une question de respect du personnel qui a toujours été excellent avec moi) proposais des peaux venant pour l'essentiel du Mexique pour le cuir porcin et du Brésil pour le cuir bovin. Autant le dire, dans le deuxième cas, j'ai eu de mauvaises surprises. Une fois sur deux la qualité des peaux laissait à désirer. (Pour la parenthèse, j'ai un article en préparation sur ce qui fait la qualité d'un cuir). Souvent, les défauts venaient des conditions d'élevage, à savoir blessures dues au fil barbelé et surtout morsures d'insectes sans compter le terrible varon. Or, un cuir trop abimé en surface fini souvent en croûte destinée à des produits bon marché (voir mon premier article sur le Cuir Véritable).
   Un ami qui travaillait avec ce fournisseur m'avait alors dit que pendant des décennies, ce dernier s'approvisionnait aux États-Unis. Apparemment, depuis une dizaine d'années, suite au rachat par un plus gros concurrent, il n'importait plus que des peaux d'Amérique latine. Cet ami était très attristé par les conséquences de choix économiques.

Plaidoyer pour le cuir européen

    Je sais, mon opinion manque terriblement d'objectivité. Cependant, je voudrais encourager les gens à acheter des produits faits dans des cuirs d'origine européenne. Premièrement pour une question de qualité. Les cuirs haut de gamme scandinaves ont une bonne réputation car leur vaches sont souvent élevées en plein air pendant l'été. La réputation du cuir italien n'est plus à faire. Au Royaume-Uni on trouve l'une des plus anciennes tanneries européenne qui utilise encore de l'écorce de chêne. Le cuir français n'a pas à rougir avec sa basane, et son cheptel varié de vaches laitières et à viande.

Stéphane Bourriaux Cuir - tannerie - dérayage
Tannerie J&FJ Baker & Co au Royaume-Uni
    Il faut aussi prendre en compte que l'Union Européenne et des organismes comme la Fédération Française des Tanneries et Mégisseries prônent des techniques de production du cuir écologique. D'ailleurs les tanneries de l'Union Européenne doivent se soumettre à la norme Reach. Pour cela il y a la gestion et le recyclage de l'eau utilisé pour le tannage : les tanneries doivent installer des bassins de récupération et de décantation de leurs boues de tannage. L'utilisation de produits de traitement à base d'eau plutôt que de solvants organiques nocifs pour l'atmosphère, la couche d'ozone et amplifiant l'effet de serre.

Bien sûr ...

    ... l'Europe produit aussi de la croute de cuir. Mais il ne faut pas oublier que la refente est un sous-produit de la production de cuir; la couche inférieure du cuir que l'on retire lorsque l'on calibre la peau à un épaisseur donnée. Il serait bête de jeter cette croute qui peut encore servir. Cependant, cela doit rester un dérivé d'un produit de qualité et non un objectif en soi afin d'amortir des cuirs déjà très limites en qualité.
    Je ne peux donc que vous encourager à investir dans des articles de cuir de qualité.

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